Ma plus grande frustration visuelle
Je crois que tous les passionnés de musique ont des souvenirs très précis de rencontres, comme des révélations, avec certains groupes, comme Matthieu qui nous racontait la sienne avec les Smashing pumpkins.
Du plus loin que me revient l'ombre de mes souvenirs anciens, je me revois vers six ans, dans un coin du salon, à enfiler l'énorme casque audio de mon père, le brancher à la chaîne et utiliser un objet qui s'apparentait à l'époque à de la technologie de pointe : la platine CD. Après la messe du dimanche, je lançais le greathist hits, fermais les yeux et voyais défiler un florilège d'histoires délirantes. J'avais envie que ma vie ressemble à cette musique, sans que je ne comprenne un mot de ce que Freddy racontait.
Queen est à indiquer à toutes les écoles primaires pour élever le niveau de leur spectacle de fin d'année. La prise de risque, le changement de rythme, les arrangements illustratifs ont quelque chose qui touche de très près à l'enfance et qui donnent au groupe un statut pop expérimentale (habituellement antinomique). Tout cela pour parvenir à un résultat ludique, sensible, jouissif.
Que reste-t-il ?
Sur le groupe et son succès, avec la quinzaine d'années qui nous sépare de la mort du leader, il semble qu'à en regarder les ouvrages consacrés aux formations "mythiques", Queen n'y soit pas, ou peut-être à la frontière, alors que les best of se vendent toujours autant et qu'il ne se passe pas une année sans que le groupe soit samplé, copié, repris (moins souvent, étant donné la difficulté technique des morceaux).
Voici peut-être un des éléments de réponse pour expliquer leur reconnaissante à mon sens mitigée, qui provient du manque d’images fortes associés à la musique du groupe. Tout les plus importants possèdent des images à forte identité, et ce point fait sans doute défaut à Queen.
Le mystère Freddy Mercury
Freddy Mercury est probablement l'un des grands héros de mon enfance, et malgré ma grande curiosité à le comprendre, je crois n'y être jamais parvenu. Pour John Lennon par exemple, je dirai qu'il s'agit d'un doux poète humaniste, pour Morrisey, je le définirais comme un mélancolique obsessionnel. En ce qui concerne le principal intéressé, il m'est plus difficile de mettre des mots sur le personnage. Est-ce que sa formation dans les arts appliqués, a-t-elle par exemple une influence sur sa carrière?
Pour la préparation de cet article, je n'ai pas réussi à savoir quel pouvoir il avait sur l'identité visuelle du groupe : le choix des vêtements, des pochettes, des mises en scènes. Mais au risque de me tromper, il était à mon avis assez important : Il a notamment dessiné le logo ci-dessus. J'ai également visionné un documentaire où il expliquait comment il avait convaincu les autres membres du groupe de se travestir pour le clip I want to break free.
Les clips vidéo
Je n'ai jamais trop apprécié, la mise en scène du groupe. Il existe pourtant toujours un champ de force qui décuple le charisme des grands musiciens, parce qu'ils ont atteints un niveau de beauté sonore qui les habille mystérieusement. Mais objectivement, en imaginant ne jamais avoir entendu leur musique, on a la sensation d'un mélange baroque entre une mode gay de mauvais goût et le loufoque des années 80 : il y a finalement chez Freddie Mercury beaucoup d'inspiration pour la musique, c’est certain, mais peut-être très peu pour l'image. Au mieux, avec le recul, on peut trouver les photos ci-dessus drôles, ce qui n'est pas, nous en conviendrons, le registre du groupe.
Il n’est pas question de remettre en question le charisme de ce dernier, plutôt ce qu’il nous en reste. Freddy Mercury était un monstre sur scène, dont beaucoup s'inspirent encore. Le meilleur aspect visuel du groupe se situent du reste dans ces performances : le live à Wembley est parfait à tout point de vue. Cependant, lorsque l'on sort de la scène, je trouve qu'on frôle souvent quelque chose d'assez caricatural, comme si la télévision et les petits espaces aplatissaient complètement la qualité visuelle.
Imaginez donc ma déception lorsqu’adolecent, j'ai découvert le clip ci-dessous, qui illustre une de mes chansons préférées. L'exemple parfait de l'occasion artistique suprêmement manquée.
Cela me prend la gorge de voir comment la pub colle des images bien plus efficaces que celles proposés par les clips du groupe. En exemple récent le We will rock you d'Évian, où cette autre utilisation (moins réussie) de la chanson. J'ai aussi une petite pensée pour les fans de Bowie qui découvrent chaque mois un nouveau sponsor à son oeuvre. Dommage que le marketing ai compris plus efficacement la magie du mariage vidéo/musique que les groupes eux-mêmes.
Paradoxalement, certains analystes attribuent l'invention du clip à Queen, qui, ne pouvant se déplacer pour toutes les émissions télés en raison du trop grand succès de Bohémian Rapsody, ont enregistré une vidéo, agrémentée d'effets spéciaux et l'ont distribuée aux diffuseurs. Les intentions pour le clip sont intéressantes, prometteuses, mais la suite est bien décevante, avec pourtant un public en attente de coller des images à une musique incroyablement visuelle.